Le sujet

En tant que professeure de théâtre, je suis souvent sur la route, parfois tard le soir, et quelle que soit ma route, sur les trottoirs, aux arrêts de bus il y a des femmes qui attendent.
Quand je les croise je m'interroge et je nous trouve finalement plus de points communs que de différences.
Le temps d'un feu rouge, nous sommes deux femmes, l'une à côté de l'autre, séparées par la vitre de la voiture, dans la même nuit, dans le même froid. Je souhaitais à travers ce film ouvrir la portière, aller vers; même s'il n'y a rien à dire.

le scénario

Le scénario a été écrit assez facilement. La situation et la suite des actions étaient là tout de suite.
Et puis de petits éléments se sont ajoutés au fur et mesure de façon spontané.
Plus qu'un scénario, c'était un déroulé, une trame, avec des indications de jeu sur l'objectif de la scène. J'ai cherché à créer un cadre que chaque artiste pouvait librement explorer et les propositions de chacun se sont rejointes.

La question était comment justifier le fait de sortir de sa voiture et d'aller vers l'autre, à une époque où nous avons tous des téléphones?

C'est mon premier film. Enfin, c'était le premier toute seule.

Le style

Je fais partie des gens qui observent et écoutent plus qu'ils ne parlent, par timidité. Il n'est donc pas étonnant que mon premier film s'exprime par l'image, et non par les mots.
C'est le langage non verbal qui m’intéresse, le langage du corps, pour moi il est plus facile que la mise en mots.
Et je pense, grâce à ma formation de comédienne que les silences sont autant sinon plus importants que les mots. C'est dans ces silences que les émotions se figent, se cristallisent. Il s'y passe énormément de choses, c'est la place de la pensée.


Il y a très peu de musique, je souhaitais proposer quelque chose de brut, sans décorum. Il n'y en a pas sur le générique final. Il y a juste la continuité de la bande son de cette femme qui reste là bien que le film soit fini.

La direction

Ce que j'aime dans la création, que se soit sur un plateau de théâtre ou sur un tournage,
c'est que chacun puisse librement apporter de sa créativité.
J'aime que mes comédiens puissent apporter leur point de vue ou leur laisser un espace où il vont pouvoir créer des choses.
Je délimite des espaces de création, je donne une direction et je laisse à mon cadreur, à mon preneur son etc, la liberté d'évoluer comme bon leur semble dans ces espaces, sur un petit tournage lorsque toute l'équipe est à l'écoute le naturel reprend ses droits. Je n'ai pas eu à beaucoup orienter les choses pour que son, image et jeu soient en harmonie.

Et puis pour ce film nous avions un lieu de tournage unique, pas de raccord lumière, tout s'est passé au même moment. C'est presque un tourné-monté.

date et lieu du tournage

En février /mars 2015 à Clapier
C'est un petit village au nord de Montpellier.
Juste en face de la médiathèque Albert Camus. Il y a un rond-point, la médiathèque, une pharmacie et l'arrêt de bus.
Ce qui était le plus difficile dans ce film c'était de trouver une cabine téléphonique.
(cliquer pour agrandir)
Elle n'existe plus. Elle a été enlevée très peu de temps après.

réalisation pratique

Le film s'est fait avec trois fois rien en une nuit. J'ai eu l'occasion de travailler sur des courts dans le cadre du Kino Montpellier, j'y ai rencontré des gens passionnés par le cinéma. J'ai donc constitué une équipe très réduite: un cadreur, un preneur son, un script et trois comédiens. Avec Vincent Rok, le cadreur nous sommes allés faire des repérages et l'aventure était lancée.
Tout s'est fait très vite et sans budget, mais avec du café !

Vous ne pouvez pas en rester là

Non, j'ai plein d'envies, mais pour le moment je suis en train d'écrire une pièce de théâtre jeune public donc, pour les mois à venir, mon imagination et mes finances sont dirigées vers cette pièce de théâtre.
Par la suite j'ai un thème et une façon de travailler qui m'intéressent.
Mais c'est un projet qui n'est pas encore écrit, ça reste de l'ordre de l'idée.
Un travail sur le clair-obscur.
C'est totalement intuitif. Donc il y a des fortes chances pour que le prochain ne ressemble absolument pas au premier.